31 mai 2012

Pulp Fiction

Pulp Fiction

Quentin Tarentino
1994

Film : Américain
Genre : Film de mafieux et de salauds chics
Avec : John Travolta, Samuel L. Jackson, Uma Thurman, Bruce Willis





Synopsis

Vincent et Jules roulent tranquillement dans les rues de Los Angeles, badinant sur la restauration rapide à travers le monde. Vincent et Jules se rendent allègrement sur leur lieu de travail. Puis Vincent et Jules font allègrement leur travail, celui d'hommes de main de Marsellus Wallace, patron de la pègre du côté d'Hollywood. Bien sûr, ce travail est un peu salissant, et ne se passe jamais trop comme prévu. Qu'il s'agisse de tenir compagnie à un boxeur, à des petits branleurs qui croient pouvoir entuber un mec comme Marsellus, ou un boxeur qui n'a pas vu qu'il était l'heure d'aller se coucher.

Avis

Lorsque sort Reservoir Dogs, Tarentino introduit son style. Ses histoires de voyous plus ou moins respectables, mais tous plus classes les uns que les autres. En 1994, avec Pulp Fiction, il réalise ce que beaucoup considèrent comme son chef d’œuvre. Le summum du genre. A travers plusieurs histoires, les pires crapules de Los Angeles semblent cohabiter à l'écran pour un festival de répliques cultes et scènes d'une grande cocasserie. C'est fluide, c'est grinçant, bref c'est Tarentino.

Et il est vrai que depuis Pulp Fiction, Tarentino n'a pas réussi à faire ne serai-ce qu'aussi bien en terme de dialogues et de comique de situation. Mais là... Là... Commençant son histoire dans un family restaurant (encore) avec une ptite frappe jouée par Tim Roth, la poursuivant avec les questionnements philosophiques de Vincent sur l'implantation de Mc Donalds en Europe avant d'assister au sermon du "prêtre" Samuel L. Jackson... Tarentino nous balade dans son univers fait de petits malfrats aux visages bien connus du cinéma hollywoodien. Harvey Kettel, Bruce Willis, Quentin Tarentino lui même... Ce Los Angeles ressemble d'avantage à une grande famille qu'au sombre univers de la pègre auquel il doit ressembler "en vrai".

Et c'est dans ce sentiment de sympathie et de camaraderie cocasse entre les morts, les flingues, la drogue et l'argent sale qui créer ce décalage dont Tarentino est si fan, qu'on se sent à l'aise avec des personnages pourtant peu fréquentables. Lorsque Vincent et Jules se retrouvent en t shirt délavé du dimanche, ce ne sont plus ces tueurs froids. Et pourtant si. L'ambivalence et le décalage, la clé du succès du cinéma de Tarentino.

Mais en dehors de son écriture loufoque et maitrisée, le réalisateur parvient également à donner une belle leçon de photo/cinématographie. Poursuivant sur la lancée de Reservoir Dogs, les plans sont lents, contemplatifs du "charme" assez particulier de Los Angeles, de ses endroits insolites, night club de mafieux, chambre de motel, cave assez bizarrement équipée, restaurant ambiance fifties avec Marylin et Buddy Holly en serveurs etc etc. L’œil de Tarentino se perd sur les détails avec cette nonchalance, ce cynisme loufoque qui a fait la gloire de ce réalisateur.

Évidemment, revenir sur le scénario est assez compliqué. Pas qu'il n'y ait pas d'histoire non. Disons plutôt qu'il n'y en a pas qu'une. Le titre, s'il me paraissait énigmatique il y a quelques années avant que je vois enfin ce film, prend quelque part tout son sens lors du visionnage. Ambiance pulp, référence à ce ciné pop-corn, sans queue ni tête, mais dont les histoires entrelacées donnent une cohérence à l'ensemble. Comme une partie de mikado ou un crumble pomme bananes.

Le résultat après les deux heures et demi, c'est qu'on a le sentiment d'avoir eu en face de soi un monument d'écriture, le réalisation et d'interprétation. Une sorte d'effet kiss cool qui file la banane. Tarentino ne réinvente pas le cinéma, mais il a une sorte de manière de faire ses films en décalé. Presque comme s'il était le cubiste du cinéma américain. La créativité, le décalage et dès ce deuxième film, la maturité.  





Notation

Réalisation : 9/10

En poursuivant sur une lancée déjà fortement prometteuse, Quentin Tarentino accouche ici d'un film réfléchit, au montage et à la réalisation posés. Ses plans séquences de dialogues au cœur des intrigues et des principales scènes rendent le film très vivant et contribuent à cette exaltation de tous les instants, qu'on soit dans les moments légers ou dans les moments dramatiques.  

Son : 8/10

Là encore, c'est en optant pour une bande son rock, ni trop calme ni trop agitée, et toujours groovy, à l'image de l'emblématique thème de Misirlou qui ouvre le film, que le réalisateur parfait l'ambiance un peu messed up et surréaliste de bon nombre de passages ubuesques.

Scénario : 10/10

L’incommensurable talent de Tarentino dans ce film, c'est de raconter une sorte de quotidien décalé, avec une nonchalance presque candide. L'histoire... Il n'y a pas vraiment d'histoire. Le scénario? Si, si il y a bien un scénario. Une écriture légère et pesante, tout à la fois. Des situations cocasses plus délectables les unes que les autres. Un très grand savoir faire dans les dialogues, comme souvent chez le réalisateur, et au final un divertissement pur comme grande leçon de cinéma de Gangster, Tarentino-like.  

Interprétation : 9/10

Sans être le plus familier avec la carrière de Travolta, c'est certainement son meilleur rôle, ou en tout cas, il n'a pas fait mieux depuis. Mais tout le casting mérite le détour. Samuel L. Jackson, qu'on adore toujours autant réussi le tour de force d'être classe avec une afro, une moustache et un t-shirt de plage lorsqu'il brandit son Colt .45, Bruce Willis, savoureux en boxeur qui refuse d'aller dormir, Uma Thurman envoutante au possible, Harvey Kettel hilarant, et nombreux sont les rôles secondaires à respirer la justesse et baigner ce film dans une douce ambiance de crédibilité absurde.

Note générale : 9/10

Lorsque vous mettez le dvd ou le blu ray dans votre lecteur, et que vous savez à quoi vous attendre, de base, vous avez la banane. Les deux heures trente qui vont suivre seront sucrées acidulées, juste ce qu'il faut pour titiller votre satisfaction cinématographique, ni dans la démesure, ni dans l'intellectualisme coincé. Et si vous ne savez pas à quoi vous attendre, le sourcil curieux va rapidement se transformer en arcade de ravissement étonné. Pulp fiction, c'est un vrai pulp, mais avec le sucre du cinéma moderne, bien secoué dans une grande bouteille pour que ça reste pas en bas.





"I'm Winston Wolfe. I solve problems"


 

7 mai 2012

Watchmen

Watchmen
Les Gardiens


Zack Snyder
2009


Film : Anglo-Américain
Genre : Film de super-héros déglingos saupoudré d'uchronie pré-apocalyptique
Avec : Patrick Wilson, Malin Ackerman
   
     
      
   
     
Synopsis
     
Ce lugubre mois d'Octobre 1985, commence par la mort d'un Comédien. Le Comédien. Depuis la dissolution en 1977 par le président des Watchmen, groupe de super-héros masqués luttant contre le crime, il travaillait pour le gouvernement de Nixon, ce qui laisse certains penser qu'il pourrait s'agir d'un meurtre politique. Rorschach, seul masqué à avoir refusé cette retraite anticipé, voit plutôt cela comme le signe qu'un mystérieux assassin s'en prend méthodiquement aux héros de la lutte contre le crime. Il est vrai que les Minutemen créés dans les années 30 ont, depuis qu'ils ont laissé le flambeau aux Gardiens, eu une trajectoire plutôt tragique dans l'ensemble et il n'en reste plus beaucoup à pouvoir témoigner de l'âge d'or des super-héros. Et alors que la guerre nucléaire entre les deux blocs menace plus que jamais, le Dr Manhattan mi-homme, mi-arme de destruction massive et bouclier antinucléaire au teint bleuté s'éloigne de plus en plus de la réalité de l'Humanité, poussant les autres Watchmen à reprendre du service pour lutter contre le crime tant qu'essayer de sauver la planète de la destruction totale.
     
Avis

Le comic book de Watchmen est un classique de DC Comics, au même titre que Batman ou Superman. Une œuvre extrêmement riche et débordante d'imagination, avec un univers uchronique savoureusement politiquement incorrect. Mais voilà. Sa trame narrative décousue a longtemps dissuadé un quelconque réalisateur de l'adapter. Ce n'est pas comme Batman où il suffit de piocher dans le sac des super-vilains, et ficeler une histoire autour de ça. Watchmen est un roman illustré. C'est une histoire profonde et particulièrement intéressante.

Mais à œuvre cultissime, le danger de l'adaptation est d'autant plus grand. Les films de super héros ont la cote depuis une bonne grosse dizaine d'années, en particulier grâce à Marvel qui a réalisé d'excellentes productions telles Spiderman, X Men, Iron Man, récemment les Avengers etc. DC n'était pas en reste avec le renouveau des Batman, et un nouveau Superman qui n'a pas forcément marqué les esprits même s'il était plutôt réussi. Du coup quand Zack Snyder annonce s'occuper de Watchmen, bon nombre de fan ont levé le sourcil.

Il faut dire que Zack Snyder a réalisé un film qui l'a fait entrer dans la légende. Plutôt trois cents fois qu'une même. Son style, si particulier semblait correspondre aux attentes à la fois des fans et des producteurs qui lui ont fait confiance, après que plusieurs projets d'adaptations aient été abandonnés.
    
Le résultat a un mérite, celui de ne pas laisser indifférent. Si les premières secondes laissent craindre un film avec une nouvelle fois bien trop d'images de synthèses, de ralentis et de combats chorégraphiés à l'excès, le sublime générique, et la pression retombant après coup nous libèrent de ces craintes. Le fait est que c'est très bien. Les décors sont glauques à soit, les personnages parfaitement réussis, et l'ambiance années 80 alternatives est vraiment au rendez-vous.
    
Mais alors que le film suit, je l'ai vu après avoir lu le comic, quasiment scène pour scène le roman illustré, le cinéphile commence à se demander où le réalisateur veut en venir. Certes, il doit introduire ses personnages, et au début ce n'est vraiment pas facile. D'abord il y a les héros des années 40, puis ceux des années 70, puis il faut comprendre qu'ils sont à la retraite...
   
Snyder nous laisse le temps de digérer son ambiance, et, à la manière de ces choses bonnes pour nous mais qui nous embêtes, comme un médicament amer, le film traine sur la longueur sur près des deux premiers tiers. Sur 2h40, c'est long!
   
Mais le fait est que le comic book est exactement sur ce format là. Durant plus de la moitié du roman, chaque chapitre est consacré à un des Watchmen, et l'intrigue peine à s'installer. Snyder a, et c'est preuve d'audace, décidé de coller strictement au comic, et se retrouve par conséquent avec les qualités de ses défauts.
   
En dehors de cela, il faut bien admettre, que même s'il adore en mettre plein la vue, le réalisateur sait ce qu'il fait. Le travail de la caméra est très soigné, celui des effets spéciaux l'est encore plus, comme d'habitude, et c'est surtout le talent avec lequel il insuffle une ambiance absolument identique à celle des années 80, mais en encore plus amplifiée par la réécriture de l'histoire, qu'on se croirait presque à l'aube d'une guerre nucléaire.

Par ailleurs, sans revenir sur l'écriture du comic, qui, elle, mérite certainement ses propres louanges, on est bluffé par la façon dont Snyder rend chacun de ses héros très humains. C'est l'attrait de Watchmen par rapport à un Super-man ou un X men. En dehors du Dr Manhattan, incarnation du méga-héros omnipotent sans défaut, si parfait qu'aucun autre auteur n'avait osé aller si loin dans les supers pouvoirs (mais sans le priver de ses propres défauts malgré tout) aucun autre Watchmen n'a de supers pouvoirs. Des gadgets, des réflexes et une force physique bien extraordinaire, certes, mais pas d'yeux laser, pas de griffes en adamantium, pas de pouvoirs divins etc.

Rongés par la bassesse de l'humanité, le film montre bien à quel point même les supers héros sont tarés au sens propre. Psychopathes, névrosés, ambivalents et mégalomanes à l'extrême, chacun est un panel de folie et un représentant grotesque de la lie de l'humanité, à commencer par le plus significatif d'entre eux, Rorschach.

Un soin tout particulier a été apporté à ce personnage si ancré dans la controverse et dans l'excès. C'est le sens encore en activité au début du film alors que tous les autres sont à la retraite, c'est le seul dont on ignore l'identité dès les premiers instants du film, et, sans avoir centré le film autour de lui, ce qui d'une part n'aurai pas été fidèle au comic, et d'autre part aurai été une erreur, c'est lui qui porte une bonne partie du film, la première notamment, si difficile à suivre, sur les épaules de son imper élimé.

Lorsque l'histoire s'emballe, que l'intrigue évoquée dans les débuts du film se dévoile, alors la fuite en avant est plus classique, et on assiste à un final de super héros, avec le super-vilain très vilain, et les héros cherchant à sauver la veuve et l'orphelin, bien que, rongés par leurs faiblesses, créant la dose de supsens indispensable à un final de cette nature.


Au final, en dehors d'une première grosse moitié, Watchmen passe avec beaucoup de facilité, et je recommande aux amateurs de se pencher sur le comique auquel la qualité du film doit beaucoup de par sa fidélité. Et pour ceux qui n'ont pas vu le film, je le conseille lui aussi avec pas mal d'enthousiasme, même s'il faut savoir faire la part des choses face à une pellicule aussi complexe.
    
   
               
    
  
Notation
   
Réalisation : 8/10

Zack Snyder est un surdoué des effets visuels. Il laisse à chacun de ses films son empreinte visuelle, et Watchmen annonce la couleur dès la scène d'introduction, et son somptueux générique qui suit immédiatement celle ci. Couleurs sépias sombres, jeux de lumières et de contrastes, le réalisateur joue volontiers avec les couleurs criardes du comic original, mais en les passant systématiquement dans un tourbillon de crasse et de poussière de charbon. Le résultat est saisissant. L'univers est glauque à souhaits malgré certains tons pastels et l'ambiance de crépuscule de l'Humanité est permanente. Première grande réussite! Dans ses cadrages, dans la symétrie des plans, dans l'utilisation du champ/hors-champ Snyder s'amuse aussi énormément pour marquer comme à son habitude le film. Sauf que. Sauf que à vouloir trop en faire, Snyder semble avoir une sorte de réflexe du débutant surdoué qui étale trop sa science. Les scènes d'actions sont entrecoupées de ralentis d'un effet douteux. Certes, depuis 300 c'est sa marque de fabrique, mais le résultat énerve plus souvent. Heureusement ces scènes ne sont pas trop nombreuses. De plus, le mélange si particulier à Snyder d'images de synthèse dans le décor ou dans les accessoires trouble un peu au début, mais on s'y fait. A mon sens, Snyder manque de la maturité nécessaire à affirmer son style, mais le résultat est malgré tout très plaisant.

Son : 9/10

L'Histoire de Watchmen s'inscrit, comme celle de beaucoup de comics par ailleurs, dans une époque. Celle de la guerre froide. L'histoire, en détournant la réalité historique de tous les événements des années 60 et 70 s'accapare également la bande son fidèle à cette double décennie, et ce sont Bob Dylan, Jimi Hendrix ou encore Simon & Garfunkel qui accompagnent les héros dégénérés de Watchmen. Pas grand chose à redire non plus sur les bruitages, bien qu'ils débordent parfois dans le bruitage de série B sur certains combats, mais c'est aussi le principe des films issus de comics.

Scénario : 7/10

Très fidèle à l’œuvre originale d'Alan Moore et de Dave Gibbons, le scénario du film est lésé par la discontinuité du scénario du comic. Certains verront cela comme une force, car son caractère très particulier conférait à Watchmen une réputation de comic inadaptable au cinéma, et le tour de force d'avoir gardé de la cohérence malgré les difficultés était une belle réussite, mais pendant 2 tiers du film, l'histoire peine à démarrer et c'est une galerie de portraits tous plus difformes et psychédéliques les uns des autres. Lorsqu'enfin la logique des enjeux prend forme, on est un peu déçu par le final et son caractère éphémère à côté du reste du film qui monte pourtant bien la mayonnaise pour un final grandiose. Certains penseront "tout ça pour ça?"

Interprétation : 7/10

Pas de grande star au générique, quelques visages familiers, et du talent, oui, mais rien pour donner à l'interprétation de ces héros un coté légendaire. Snyder a voulu coller à la BD et les acteurs s'effacent un peu derrière leur personnage. Certes, l'adaptation est plutôt réussie, les personnages sont eux aussi très fidèles à leur personnalité dans le comic, mais la prédominance de la personnalité des personnages supplante celle des acteurs. Encore une fois c'est très subjectif.

Note générale : 8/10

Watchmen est un bon film, voir un très bon film, mais un film qui partage. Certains y verront l'adaptation parfaite d'un comic culte, d'autre un film long et lent qui se mord la queue pour faire pshit à la fin. De même, si le style de Snyder est indéniablement une prouesse tant cinématographique que technologique, il partagera entre les pro effets graphiques et les contres. Sans être le meilleur film de Snyder, Watchmen reste, comme 300 l'une des bases du succès futur de se réalisateur, et le mieux pour vous faire votre propre opinion sur ce film si particulier, c'est de le regarder.
     
    

   
   
"None of you seem to understand. I'm not locked in here with you. You're locked in here with me!" 

2 mai 2012

Requiem for a Dream

Requiem for a Dream

Darren Aronofsky
2000

Film : Américain
Genre : Drame psyché dramatique
Avec : Jared Leto, Ellen Burstyn, Jennifer Connelly



  
  
  
Synopsis

L'été commence sur Coney Island. Mais à la chaleur réconfortante du soleil, Harry, son pote Tyron et sa copine Marion préfèrent celle de la drogue, dans leurs veines, leurs sinus ou leurs poumons. Sara, la mère d'Harry préfère la télévision. Surtout quand on l'appelle pour lui proposer de participer à une émission. Malheureusement elle ne rentrera jamais dans sa robe favorite à temps. A moins peut être qu'elle ne prenne quelques pilules amincissantes. En vendant de la drogue, Harry et Ty se font assez de sous pour que la came coule à flots, mais l'automne arrive, et avec lui quelques complications.
    
Avis

Parce qu'il joue sur la carte d'un psychédélisme malsain, bien loin de Las Vegas Parano ou de Trainspotting, références antérieurs en terme de film de junkies dans les 90's, Requiem for a Dream marque aisément les esprits, qui ne s'attendent certainement pas à une chute si abyssale.

Jouant parfaitement la tragédie en 3 actes, le scénario et la mise en scène plongent à chaque instant le spectateur dans un état d'immersion avancé introduit par des gimmicks représentant chacune des drogues utilisées. L'inventivité de la réalisation pour trouver des plans plus nauséeux les uns que les autres relève du génie. L'effet stroboscopique version pub/clip de certains passages possède un effet abrutissant visant à plonger la personne qui regarde Requiem for a dream dans un état second que seules quelques bouffées d'oxygène pur parviennent à dissiper avant la rechute.

Si on peut louer le professionnalisme avec lequel Aronofsky nous plonge dans l'état escompté, il est à parier que tout le monde ne ressorte pas de là indemne. Certains auront le sentiment d'avoir été écorchés vifs, d'autres plongés dans l'eau bouillante ou au contraire aspergés d'eau glacée, d'autre verront plus cela comme un rétrécissement soudain des murs qui les entourent. Mais quel que soit l'impression finale, Requiem for a Dream laisse sa marque. Libre a chacun de voir s'il apprécie cette marque, ou va chercher à s'en débarrasser au plus vite.

Le principal atout de ce film est de faire oublier qu'il s'agit d'un film. A travers la réalisation coup de poing, certainement très prétentieuse et malgré tout un peu convenue, on oublie cependant de faire attention à la forme et même au fond des choses. L'irréalité de certaines scènes déforme notre perception du cinéma, et c'est donc naturellement qu'on se laisse portés. Parce que ce film est loin d'être parfait. Si la narration est plutôt réussie, il laisse cependant un gout d'inachevé, de pas toujours exploité à son optimum.

A peine une demie heure après, l'effet redescend déjà, le monde redevient stable, les formes figées, et si on loue la capacité de ce film à monter très haut, très vite et très fort, on regrette assurément qu'il ne sache pas faire durer le plaisir plus longtemps... Je crois que je vais devoir me le remater très vite avant d'être à nouveau en manque!





Notation
    
Réalisation : 8/10
   
Psyché, stroboscopique, moderne, foutrement arrogante, la mise en scène, les effets visuels et la photographie blafarde laissent un gout acidulé au fond de la rétine. Le but avoué est de rendre le spectateur ivre de tous ses effets et de ce montage hallucinatoire. Pari réussi, mais à quel prix? La réalisation parvient à nous faire oublier qu'il s'agit d'un film, mais parvient elle à nous faire penser qu'il ne s'agit pas d'un clip de 2h?

Son : 8/10

Le montage sonore est en parfaite équation avec le montage visuel. Bruitages hachés, presque caricaturaux, leitmotivs et gimmicks sonores autant que visuel, effets de ralentit/accéléré sur les voix, tout est bon pour déstabiliser l'oreille interne aussi bien par l'ouïe que par la vue. Les mélodies sont elles aussi très lancinantes et parfois désarticulées, mais leur effet est plutôt réussi, à l'image du reste de la production.

Scénario : 8/10

L'idée n'est finalement pas si originale puisqu'elle suit 4 junkies aussi similaires que différents dans leur descente aux enfers, mais elle a le mérite d'être diablement bien narrée. Chacun des personnages possède une sorte de vision bien particulière, et la manière dont ces 4 destins sont liés présente un intérêt vraiment significatif dans la manière où, d'un tronc commun ils de séparent, parfois entremêlés, parfois complètement opposés.

Interprétation : 9/10

Il faut bien avouer que chaque personnage est campé avec un réalisme saisissant. Les rôles, à la fois simples et complexes sembler coller à la peau de chacun des acteurs, si bien que chaque rôle de Jared Leto (comme, celui du frère de Yuri Orlov dans Lord of War) semble rappeler celui ci, sans pourtant le peser comme un masque trop lourd à porter. Et d'ailleurs la force de l'interprétation est l'une des principales composantes de la réussite du malaise que le film cherche à porter.

Note générale : 9/10

A la fois réussite incontestable et film imparfait, Requiem for a Dream marche à l'affect. Bien que très joli, bien écrit et bien interprété, j'ai du mal à considérer qu'il s'agisse d'un des chefs d'oeuvre du cinéma contemporain. Et pourtant? Une note surement très exagérée mais qui reflète parfaitement le sentiment de béatitude dans lequel il vous laisse. Aussi malsain et répréhensible soit il, un fix de Requiem for a Dream peut vous porter très loin.



  


"California, Florida, whatever. Either way, ya pale ass is getting a tan!"