Margin Call
J.C. Chandor
2011
Film : Américain
Genre : Thriller boursier
Synopsis
Pour Eric Dale, cette matinée de printemps commence assez mal. La banque d'affaires qui l'emploie depuis 19 ans se voit obligée de réduire ses effectifs, et il ne se retrouve pas du bon côté de la ligne. Pourtant, il travaillait sur quelque chose d'important. Avant de vider son bureau, il parvient néanmoins à transmettre à Peter, l'un de ses brillants courtiers une clé USB contenant ce sur quoi il travaillait. Son dernier conseil avant que l'ascenseur ne se referme sur lui est "Sois prudent". Le soir même, Peter examine le contenu de la clé. Ce qu'il trouve dessus, créer un séisme silencieux. Il fait remonter l'information aux échelons de le hiérarchie, jusqu'à la réunion du Comité Executif qui doit prendre une décision dont les répercussions pourraient être dramatiques pour l'économie mondiale.
Avis
On se souvient tous de l'année 2008. Une onde de choc économique qui a fait trembler les Goldman Sachs, Lehman Brothers et autres établissements névralgiques de la finance mondiale. Une onde de choc qui força les États à piocher dans les finances publiques pour sauver l'équilibre économique complètement ébranlé. Outre l'indignation des peuples, assez scandalisés que leurs impôts servent à payer les pots cassés de boursicotteurs qui roulent en Ferrari, ce séisme a en outre laissé sur le carreau des peuples entiers, demandez au Grecs ce qu'ils en pensent. Et à la base de tout ce système bancal, un mot avait fait à l'époque le tour des JT, sans finalement dépasser son concept assez abstrait dans les esprits. "Subprimes".
J.C. Chandor et Zachary Quinto, producteur et acteur dans ce film, avaient dans l'idée d'évoquer l'élément déclencheur de la crise sans pour autant diaboliser Wall Street. Pas forcément par empathie pour les financiers, on ne peut pas dire que Jeremy Irons interprétant le PDG de la fameuse firme concernée mais jamais nommée, attire particulièrement la sympathie sur son personnage, mais dans un souci d'ambivalence entre le faste de ce monde très fermé, et la répercussion de leurs actes aux catastrophes à venir. Le réalisateur dépeint alors une galerie de portraits, à tous les échelons. Qu'il s'agisse du directeur de branche, quadra froid et implacable, du jeune loup aux dents longues obsédé par l'argent ou le rôle de Kevin Spacey, qui se veut à la fois juste et terriblement cynique aussi, le personnel de cette société ne tombe jamais dans le manichéisme.
Et c'est donc tout naturellement au casting, dans un premier temps, dans un premier temps, qu'il faut tirer son chapeau. Kevin Spacey est absolument époustouflant. Sa bonhomie cache une bonne partie du film la vraie nature de son personnage qu'on ne saurai classer catégoriquement dans les gentils ou les méchants, bien qu'on s'en doute un peu quand même. Et derrière ce porte-étendard se cachent de nombreux acteurs extrêmement talentueux. Demi Moore, Simon Baker, Stanley Tucci, Paul Bettany... Chaque rôle distribué à la perfection. Mais un rôle ne tient pas qu'à son interprète. Car le scénario a une force vraiment admirable, celle de présenter, je le disais des portraits complètement saisissants, il a aussi le mérite de nous plonger dans un univers, une ambiance. New York, Wall Street, un building immense, une salle de réunion surplombant la ville, des hommes en costume 3 pièces à 4h du matin, et par dessus tout ce côté "thriller" sur l'aspect boursier, avec un jargon à la fois assez simple pour permettre au public de suivre, mais pas non plus dénué de sens, pour garder toute sa crédibilité. Ajoutez à cela une cohérence sur l'enchainement des situations, cette impression d'effondrement à tous les échelons de la firme et l'implication sur l'économie mondiale, dont on subit toujours au jour d'aujourd'hui les effets, le scénario est vraiment l'un des points forts de ce film.
Certes, il ne plaira pas à tout le monde. Si vous avez pleuré Chavez et que Mélenchon parle haut et fort vos idées, la fascination qu'insuffle le réalisateur à l'univers boursier vous laissera certainement froid. Car à travers la caméra de JC. Chandor, ce sont des écrans affichant des courbes d'actions, des chiffres, des chiffres, et encore des chiffres, des graphiques colorés contrastant avec la sobriété classe des bureaux, et puis cette ambiance de building endormi sauf pour quelques uns, tenant le monde financier entre leurs main, au coeur d'un New York printanier. Cette mise en scène particulièrement lissée convient parfaitement à l'ambiance dans laquelle plonge le scénario. Et pour avoir arpenté les couloirs d'un grand building à la Défense à 7h du matin, je sais à quel point ce sentiment d'irréalité transparaissant dans le film est véridique.
Le point de vue du réalisateur est d'ailleurs intéressant. Plutôt que de dénoncer les dérives absolument scandaleuses d'un système qu'on sent bien pourri jusqu'à la moelle, il préfère nous dicter une fable moderne sur les événements à la fois ordinaires et extraordinaires qui peuvent se passer, la nuit, à Wall Street. Car certes, des événements menant à une crise planétaire, il ne s'en passe pas toutes les nuits dans tous les buildings de New York, mais à l'échelle de la finance internationale, des meetings d'urgence du ComEx d'un groupe, il y en a régulièrement, et derrière le prétexte de la crise de 2008, c'est cette situation, l'ambiance de précarité qui en découle, le doute dans la tête des acteurs de ce milieu, jeunes, vieux, blindés de talent, ou simples soupapes de sécurité, qu'on nous raconte.
Réalisation : 8/10
L’œil du réalisateur a cela de talentueux, qu'il sait transcender son environnement pour le rendre esthétique. Margin Call propose principalement des couloirs, des bureaux, des salles de réunion, dans un gratte-ciel new-yorkais. Derrière l'apparente austérité de ces murs blancs moquette grise, J.C. Chandor trouve la poésie du lieu de travail. Une impression de profondeur réussie sur un gigantesque open-space vide et sombre, si ce ne sont les dizaines d'écrans des courtiers, une vue de Manhattan à l'aube depuis un grand bureau froid, une table en noyer entourée d'hommes et de femmes en complet étriqués. Il y a dans ce film, une sorte de plastique méticuleuse vraiment attirante.
Son : 7/10
Minimaliste, la musique est très peu présente sur l'ensemble du film, si ce n'est par touches sobres et graves pour souligner la tension d'une situation. La vraie musique de ce film est d'ailleurs plus constituée des discours tout aussi graves des protagonistes, dont l'alarmisme mesuré et pesant rythme les dialogues.
Scénario : 8/10
L'écriture de Margin Call déroute un petit peu au début. Certes le ton est dur, on repère tout de suite le malaise qui règne dans ce monde tordu de la finance internationale, mais l'histoire dérive ensuite entre une sorte de subjugation pour l'univers, tout en cherchant à raconter une histoire romancée inspirée de faits on ne peut plus réels. C'est cette ambivalence permanente qui surprend, mais les situations et les personnages sont si bien dépeints qu'on se laisse happer par l'ambiance jusqu'à la fin du film.
Interprétation : 9/10
Kevin Spacey en tête, le casting luxe de ce film est le gros plus de ce film. Chaque rôle, majeur et mineur semble taillé sur mesure pour leur interprète, contribuant à l'immersion dans l'intrigue. Jeremy Irons est un excellent PDG, implacable. Simon Baker, tout aussi excellent dans son rôle de directeur... et bien implacable lui aussi. Demi Moore en salope tout aussi implacable est bluffante, et Zachary Quinto, au milieu de ça, lui a un plus beau rôle qui semble correspondre parfaitement à ses épaules. Super casting, vraiment.
Note générale : 8/10
Sous ses airs un peu alternatifs, Margin Call est un très bon film, très équilibré. Ne souffrant d'aucune faute notable, si ce n'est peut être la difficulté qu'il aura à faire l'unanimité selon certaines sensibilités économiques, il est l'archétype du long métrage immersif dans un monde fantasmé et inconnu de la majorité du grand public. Porté par son casting époustouflant, et la sobriété qu'il dégage, il accrochera au fauteuil quiconque cherche une plongée ahurissante dans le monde de Wall Street.
Certes, il ne plaira pas à tout le monde. Si vous avez pleuré Chavez et que Mélenchon parle haut et fort vos idées, la fascination qu'insuffle le réalisateur à l'univers boursier vous laissera certainement froid. Car à travers la caméra de JC. Chandor, ce sont des écrans affichant des courbes d'actions, des chiffres, des chiffres, et encore des chiffres, des graphiques colorés contrastant avec la sobriété classe des bureaux, et puis cette ambiance de building endormi sauf pour quelques uns, tenant le monde financier entre leurs main, au coeur d'un New York printanier. Cette mise en scène particulièrement lissée convient parfaitement à l'ambiance dans laquelle plonge le scénario. Et pour avoir arpenté les couloirs d'un grand building à la Défense à 7h du matin, je sais à quel point ce sentiment d'irréalité transparaissant dans le film est véridique.
Le point de vue du réalisateur est d'ailleurs intéressant. Plutôt que de dénoncer les dérives absolument scandaleuses d'un système qu'on sent bien pourri jusqu'à la moelle, il préfère nous dicter une fable moderne sur les événements à la fois ordinaires et extraordinaires qui peuvent se passer, la nuit, à Wall Street. Car certes, des événements menant à une crise planétaire, il ne s'en passe pas toutes les nuits dans tous les buildings de New York, mais à l'échelle de la finance internationale, des meetings d'urgence du ComEx d'un groupe, il y en a régulièrement, et derrière le prétexte de la crise de 2008, c'est cette situation, l'ambiance de précarité qui en découle, le doute dans la tête des acteurs de ce milieu, jeunes, vieux, blindés de talent, ou simples soupapes de sécurité, qu'on nous raconte.
Notation
Réalisation : 8/10
L’œil du réalisateur a cela de talentueux, qu'il sait transcender son environnement pour le rendre esthétique. Margin Call propose principalement des couloirs, des bureaux, des salles de réunion, dans un gratte-ciel new-yorkais. Derrière l'apparente austérité de ces murs blancs moquette grise, J.C. Chandor trouve la poésie du lieu de travail. Une impression de profondeur réussie sur un gigantesque open-space vide et sombre, si ce ne sont les dizaines d'écrans des courtiers, une vue de Manhattan à l'aube depuis un grand bureau froid, une table en noyer entourée d'hommes et de femmes en complet étriqués. Il y a dans ce film, une sorte de plastique méticuleuse vraiment attirante.
Son : 7/10
Minimaliste, la musique est très peu présente sur l'ensemble du film, si ce n'est par touches sobres et graves pour souligner la tension d'une situation. La vraie musique de ce film est d'ailleurs plus constituée des discours tout aussi graves des protagonistes, dont l'alarmisme mesuré et pesant rythme les dialogues.
Scénario : 8/10
L'écriture de Margin Call déroute un petit peu au début. Certes le ton est dur, on repère tout de suite le malaise qui règne dans ce monde tordu de la finance internationale, mais l'histoire dérive ensuite entre une sorte de subjugation pour l'univers, tout en cherchant à raconter une histoire romancée inspirée de faits on ne peut plus réels. C'est cette ambivalence permanente qui surprend, mais les situations et les personnages sont si bien dépeints qu'on se laisse happer par l'ambiance jusqu'à la fin du film.
Interprétation : 9/10
Kevin Spacey en tête, le casting luxe de ce film est le gros plus de ce film. Chaque rôle, majeur et mineur semble taillé sur mesure pour leur interprète, contribuant à l'immersion dans l'intrigue. Jeremy Irons est un excellent PDG, implacable. Simon Baker, tout aussi excellent dans son rôle de directeur... et bien implacable lui aussi. Demi Moore en salope tout aussi implacable est bluffante, et Zachary Quinto, au milieu de ça, lui a un plus beau rôle qui semble correspondre parfaitement à ses épaules. Super casting, vraiment.
Note générale : 8/10
Sous ses airs un peu alternatifs, Margin Call est un très bon film, très équilibré. Ne souffrant d'aucune faute notable, si ce n'est peut être la difficulté qu'il aura à faire l'unanimité selon certaines sensibilités économiques, il est l'archétype du long métrage immersif dans un monde fantasmé et inconnu de la majorité du grand public. Porté par son casting époustouflant, et la sobriété qu'il dégage, il accrochera au fauteuil quiconque cherche une plongée ahurissante dans le monde de Wall Street.
"I spent 76 520 dollars on booze, dancers and whores."
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