Godzilla
Gareth Edwards
2014
Film : Américain
Genre : Film de kaïju sans carton-pâte
Avec : Aaron Taylor-Johnson, Bryan Cranston
Synopsis
En 1999 aux Philippines, des ouvriers d'une mine tombent sur une cavité gigantesque abritant une immense carcasse de monstre antique. Ils appellent immédiatement l'organisme chargé de l'étude et de la surveillance de ce type de grosses bébêtes, qui trouve la chrysalide d'un parasite sur place. A quelques milliers de km de là, au Japon, Joe Brody assiste impuissant à la fission du réacteur dans la centrale nucléaire où il travaille avec sa femme qui trouve la mort dans l'accident. Après 15 ans, toujours persuadé qu'une cause extérieure non naturelle a provoqué l'accident, Joe continue a parcourir la zone interdite à la recherche de preuves à présenter à la presse. Son fils devenu militaire de l'US Navy et de retour de mission, cherche alors à le convaincre d'arrêter sa quête vouée à l'échec et de rentrer aux Etats Unis. Mais alors que Joe parvient à convaincre son fils de l'aider lors d'une dernière sortie dans la zone d'exclusion, ceux ci sont capturés par les autorités et ils assistent depuis les ruines de l'ancienne centrale à la naissance d'un mutant gigantesque qui s'échappe et commence à faire régner le chaos.
Avis
Godzilla est un sujet délicat. Roi des kaïju, il dispose d'un statut d'icône au Japon, et chaque nouveau projet, d'un côté ou de l'autre du Pacifique créer des remous qui satisfait à peu près autant de personnes qu'il se créer d'ennemis mortels. Le film de 1998 avait atteint des niveaux de nanard cosmodésique assez improbable, et je me rappelle même l’émergence à la suite de ce navet d'une série animée qui passait sur Canal J quand j'étais minot racontant les aventures de ce bon Docteur Tatopoulos et de son pet-Godzilla parce que c'est toujours bon d'avoir un side-kick de 150m de haut. Roland Emmerich était déjà rentré dans la postérité dans les années 90 pour quelques beaux navets à coté de films sympatoches genre Stargate, et n'était qu'au début de ses frasques cinématographo-catastrophiques finalement, mais il avait réussi à s’attirer l'exaspération d'un paquet de cinéphiles pour qui l'essence de Godzilla avait complètement disparu, et engendré une hantise du film de monstre raté.
Par conséquent, le parfum du reboot, tellement à la mode, avait des notes de moisi derrière l'odeur de peinture fraiche, et c'est méfiant que j'ai mis les pieds dans la salle de cinéma. Première surprise : Godzilla n'est pas le seul monstre du film, il se tire la bourre avec deux MUTOs, des espèces de sales bestioles plus ou moins insectoïdes qui m'ont rappelé les nuits d'été où Arte avait eu la bonne idée de passer les Godzilla vs Mothra et autres classiques du kaiju japonais, mais ici, point d’immeubles en carton tirés d'un mauvais épisode des Power Rangers, qui dit budget Holywood-gros-cigare-here's-your-bag-of-cash dit effets visuels tip-top pour te faire passer la pilule que t'as encore payé 1,5€ tes lunettes 3D que t'oublies à chaque fois chez toi au lieu de les réutiliser.
Et en fait je pourrais dire "point à la ligne, merci d'être passé" parce que grossomodo, le film capitalise un maximum la-dessus. Good-guy Godzilla vs Bad-guys MUTOs et des FX à faire baver un graphic designer. Le scénario se perd à la moitié du film dans une sorte de méli-mélo avec plein de charabia scientifico-pouet pouet, les personnages charismatiques du film ne font RIEN. L'immense Ken Watanabe, inoubliable Saito dans Inception, se contente de suivre Godzilla a la trace et de le regarder faire, et Aaron TJ (désolé 2 noms c'est trop, et encore t'as du bol que je t'appelle pas Kick-Ass Bidasse) fait genre "Je suis un militaire, j'vais faire des trucs!" pour au final avoir a peu près autant d'effet sur Godzilla et les deux autres qu'un moucheron anorexique.
Bien sûr, on peut aussi regarder Godzilla sous l'oeil de la symbolique. Les kaiju et en particulier Godzilla ont toujours été la réponse du Japon à l'attaque atomique d'Hiroshima et de Nagasaki. Le Japon d'après guerre, traumatisé par l'atome a personnifié celui ci dans des monstres mutants nés de la suffisance de l'homme face à la nature, pour lui faire expier ses pêchers. Or dans ce film (américain et non japonais, faut il le rappeler) la symbolique s'approprie une continuité plus actuelle à cette problématique, et ce sont les dommages de l'incident de Fukushima qui sont sous-jacents dans la première moitié du film. Le MUTO devient alors la cause de l'incident nucléaire analogue à celui qu'a vécu le Japon en 2011, et Godzilla, autrefois bourreau du Japon vient aujourd'hui terrasser cette menace. Bon. On passe quand même rapidement la dessus, parce que si le clin d’œil est sympathique, le scénario prend bien soin de se perdre en conjectures et en gloubiboulga dantesque sur la deuxième moitié pour que le spectateur en ait pour son argent.
Kaiju fight! *musique néo-métal* Parce qu'en gros, pas besoin d'en dire plus sur la deuxième moitié du film qui sombre dans un océan de facilité graphique et spectaculaire. On met le scénario de coté, on met les persos charismatiques de coté, et on laisse des gros machins géants se foutre sur la gueule en plein milieu d'une ville en ruine, sous un épais nuage de fumée/poussière/vrais nuages (on sait pas trop) juste pour que ça donne son effet post-apo de rigueur et que ça évite de trop pré-calculer de décors sur les CG. Du coup la dernière petite heure du film, la perspective du spectateur consiste a se visser au fond de son siège de ciné, les lunettes sur le nez et de bouffer son pop corn pendant que les immeubles s'effondrent sous les projections et les fatalities des kaïju, que les bidasses se retrouvent nez à nez avec des têtes de streum pour un des meilleurs effets 3D stéréoscopique depuis un moment, et que le scénario improbable nous balade d'un Golden Gate coupé en deux à un train de marchandises équipé de têtes nucléaires à une petite leçon de chute libre avec fumigènes colorés. Pfuah! Quand on ressort de la, on a le cerveau vidé remplacé par tout plein d'images jolies et de moments épiques façon "Hooooo! Hohoho!" Après tout, c'est ça Hollywood.
Notation
Réalisation : 9/10
Plus je fais de chros, plus je me dis qu'il faut que je sépare la réalisation des effets visuels. Qu'on s'entende bien. Gareth Edwards est un très bon graphiste. Il a la capacité à créer des ambiances visuelles, des effets de profondeur et de donner du volume à son oeuvre graphique. Il a aussi la bonne idée de rendre quelques petits hommages aux icônes, comme ce petit traveling partant de la vitre d'un véhicule qui rappellera forcément la scène du T-Rex de Jurassic Park. En dehors de ça, c'est pas Hitchcock non plus. Disons simplement que le réalisateur de ce film était le pion d'une grosse machine hollywoodienne, et qu'en tant que réalisateur son boulot était de rendre l'image très jolie. mission accomplie.
Son : 6/10
Petite déception à vrai dire. J'attendais du cri de Godzilla de me figer sur place comme celui du Tyrannosaure puisque j'évoquais à l'instant Jurassic Park. Son "Wiiiiiiiiiiiiiiiii-iiinrhhh" ne restera pas forcément dans les annales et c'est dommage. Idem pour les MUTOs qui auraient pu avoir un bruitage un peu plus effrayant que ce "claclaclac" finalement banal. Quant à la BO, le thème principal est légèrement répétitif, et pas forcément mémorable non plus.
Scénario : 4/10
L'effort de mise en contexte est louable. La scène d'intro en hélicoptère sur un site de fouille rappelle là encore JP, la scène de la centrale implique tout un questionnement sur la dangerosité de l'énergie nucléaire, les démons qui habitent le personnage de Bryan Cranston sont terriblement bien imaginés, et la tension monte progressivement jusqu'à la première confrontation avec le MUTO... Et puis le soufflé retombe d'un coup. Comme si le scénariste arrivé à la moitié de son script avait lâché son ordi pour ouvrir le coffre à jouets de son fils et bruiter des "Piou piou! Crash! Braoum! Ratatatatatata!" avec la bouche, une figurine dans chaque main.
Interprétation : 5/10
Pas facile de noter des acteurs qui ne font RIEN. Un peu comme si vous aviez acheté la dernière télé Samsung 70 pouces 4K mais que vous comptiez regarder la VHS de vos vacances à Antibes dessus. Ken Watanabe, Bryan Cranston passent leur temps à faire un joli grand rien ultra productif *irony inside* quant à Aaron -Bidasse- TJ on a du mal à croire que son regard bovin ait été si convaincant dans Kick Ass, parce que lui, non seulement il fait rien, mais en plus il le fait en ayant l'air con comme un balai à chiottes. On passe sur les "rien" de l'armée américaine incarnés par autant d'acteurs tertiaires vus dans dans seconds rôles de séries ou de films Z, qui font rien, mais avec seulement 2 lignes de texte.
Note Générale : 6,5/10
On l'aime bien Godzilla. Il est grand, il est sympa, c'est un gros nounours d'écailles qui crache du feu nucléaire, et qui (spoiler alert) pète la gueule des meychants MUTOs avec une bonne grosse classe bien badass, et qui en plus le fait dans une ambiance graphique franchement réussie. Le problème, c'est que l'équipe du film a jugé inutile d'embaucher des scénaristes. Mais comme à Hollywood ces dernières années ils sont a peu près aussi prisés sur les block busters qu'un ingé son sur un film muet ou un décorateur sur un film d'animation, on se contente du minimum syndical "T'vas prendre ta claque graphique dans la gueule alors fais pas chier". Bon, soit. Film pop corns quoi.
"Ret them fight!"